La vraie histoire du Barbier

Publié le par cultumusic

La vraie histoire du Barbier.

 

Les critiques , les mélomanes, les musicologues (amateurs et même professionnels) ont noirci des pages entières à propos de la composition et de l'accueil du Barbeir de Séville que je désirais, à l'aide de sources convergentes, remettre les pendules à l'heure.

Contrairement aux idées reçues, Rossini ne composait pas en dilettante, il n'était pas du tout paresseux: ce sont des contre-vérités inacceptables.  Quant au Barbier, on a prétendu qu'il l'avait composé en huit jours à peine avec une "désinvolture" qui tenait de la paresse : tout ceci est non seulement impensable, mais donne à Gioacchino une réputation bien peu flatteuse.  Rendons donc à César …  

Que s'est-il passé de particulier le soir de la première de "Il Barbieri di Siviglia", le 20 février 1816 au Teatro di Torre Argentina à Rome?  La première représentation est un véritable four entré dans la légende.  On croit deviner ce qui s'est passé.  La pièce de Beaumarchais avait déjà été adaptée par le compositeur Paisiello, très admiré de son vivant, et qui avait monté cet opéra pour la grande Catherine de Russie.  On suppose donc qu'une cabale des anciens a provoqué le

 

chahut monumental du 20 février, malgré les précautions prises par Rossini, qui se doutait un peu de ce qui allait arriver, mais pas dans ces proportions!  Il avait même changé le titre de l'œuvre en "Almaviva, ossia l'inutile Precauzione" (Almaviva, ou la Précaution Inutile).

Dans le livret distribué à l'entrée, il avait commencé par un avertissement au public.  Anecdotes qui pimentent cette première représentation:

 

-   le ténor, très fatigué et voulant masquer son manque de tonus, décide de s'accompagner pour un air à la guitare;  il casse une corde devant un public écroulé de rire.

-   La basse qui tient le rôle de Basile entre en scène droit comme un         « i », se prend les pieds dans le tapis et va se cogner au décor où son nez se met à saigner abondamment.

- Enfin, un chat, venu on ne sait d'où, traverse la scène et le public se met à miauler.

Fatigué par cette mascarade, Gioacchino quitte sa place au clavier, quitte la salle et rentre chez lui.  Outré par le sort réservé à ce qu'il croit être son chef-d'œuvre bouffe, il rate le triomphe de la deuxième représentation, triomphe qui ne se dément plus après près de deux siècles.

Pourtant, notre Italien teuton n'a pas lésiné sur la transpiration pendant la composition du Barbier : il a été composé en treize jours,

                                           

c'est-à-dire le temps qu'il faut pour recopier la musique. Ce qui a fait dire à certains critiques snobinards que ce ne pouvait être qu'une œuvre bâclée.  S'ils avaient examiné le manuscrit autographe, ils en auraient été pour leurs frais : il n'y a que du génie de la première à la dernière note bien que, pour accélérer la composition, Gioacchino n'hésite pas à emprunter des passages entiers à quelques œuvres antérieures peu connues. 

 

Atteint de fièvre, d'accès de délire, il arrivera à ses fins,  dans les temps, et dans des conditions extravagantes : le librettiste Sterbini se trouve cloîtré dans une pièce, le compositeur dans la pièce voisine sue sang et eau, travaillant jour et nuit.  Dans une autre pièce, les copistes viennent chercher les feuilles une à une pour les recopier aux fins de les transmettre aux musiciens et chanteurs qui peuvent déjà répéter alors qu'ils ne connaissent même pas l'intrigue exacte que leur a concoctée notre fou de génie. 

 

Ce rythme effréné n'est pas une exception chez Rossini : bien des œuvres postérieures seront composées dans des conditions plus ou moins similaires.  Ce sera notamment le cas de "la Cenerentola", adaptation libre du conte Cendrillon.

 

Rossini racontera plus tard à qui voulait l'entendre qu'il n'avait même pas eu le temps de se raser pendant ces treize jours (sous toute réserve).

Voilà donc les conditions dans lesquelles est né l'opéra bouffe le plus célèbre de toute l'histoire de l'opéra.

 

 

 

Publié dans MUSIQUE CLASSIQUE

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